Congrès FCPE : la violence à l’école au cœur de la table ronde
La première invitée, la secrétaire générale de l’UNL Héloïse Moreau, témoigne de son expérience de lycéenne et embraye directement sur les difficultés rencontrées par son mouvement avec les réformes Blanquer. Elle a ensuite poursuivi en mettant en avant le fait que l’une des premières manifestations de ces violences à l’école est le harcèlement. Pour son syndicat, il est avant tout essentiel de faire de la sensibilisation des élèves pour qu’ils ne deviennent pas agresseurs, et sensibiliser les témoins pour qu’ils soutiennent davantage les agressés. « Il faut davantage de moyens, notamment pour former tous les personnels, explique Héloïse. Mais il existe beaucoup d’autres violences : N’est-ce pas une violence d’être 35 par classe ? N’est-ce pas une violence de subir son orientation ? Nous proposons des investissements massifs dans la formation des assistants d'éducation, nous demandons aussi que les programmes parlent davantage des questions de la parité, de sexualité, des différences genrées… »
C’est ensuite la sociologue et philosophe Irène Pereira qui a pris la parole, rappelant que de nombreuses violences ont une origine discriminatoire. Elle explique également que certaines discriminations ne sont pas prises en compte par la loi, comme celles qui sont institutionnelles, comme celle par exemple de solliciter certains élèves plus que d’autres alors que cela contribue à créer des différenciations dans les apprentissages. C’est la répétition de ces micro-violences qui est problématique. « Il est nécessaire de prendre conscience de ces discriminations qui traversent l’école, affirme Irène Pereira. Il faut une formation sociologique pour affronter ces problématiques, en particulier des enseignants. La place des parents pose la question des alliés dans l’institution scolaire, des alliances importantes pour lutter contre les ségrégations. »
La prévention de la violence scolaire se joue déjà dans l’acte pédagogique au quotidien
Jean-Marc Huart, directeur de l'enseignement scolaire, a ensuite rendu hommage à la FCPE. « Nous nous voyons avec la FCPE, nous avons un dialogue franc et direct, parfois musclé, dit-il. Pour revenir à la thématique, je répondrai que l’école doit contribuer à lutter contre les violences. C’est un sujet qui permet de trouver une forme de consensus sur les objectifs. La lutte contre la violence passe par le travail sur le climat scolaire. Nous avons modifié les grilles horaires pour passer à 18 heures annuelles plutôt que ½ heure par semaine. Nous avons aussi réintroduit la question des LGBTphobies dans le programme. De l’école primaire jusqu’au lycée, l’enseignement moral et civique doit être au cœur de la lutte contre le harcèlement. D’ailleurs, ce sont 10 mesures nouvelles qui ont été annoncées par M. le ministre et Brigitte Macron, comme la formation des professeurs et des ambassadeurs, l’introduction dans l’évaluation des établissements scolaires du climat scolaire. Dans cette lutte contre les violences et les discriminations, le dialogue doit être essentiel entre les parents et les institutions, au niveau des établissements comme des académies. »
Enfin, pour conclure, le célèbre pédagogue Philippe Meirieu s’est exprimé sur la question. Il a commencé par poser la question de savoir si tous étaient égaux devant la prise de parole. « Je voudrais faire deux séries de remarques. Rappeler que la prévention de la violence scolaire se joue déjà dans l’acte pédagogique au quotidien, puis rappeler que les valeurs que transmet l’école, ce sont celles du quotidien. L’école a pour mission de substituer aux rapports de force des relations fondées sur l’exigence de respect d’autrui. C’est parce qu’on libère les élèves de leur réactions primaires qu’on leur permet de passer à autre chose, ce n’est pas spontané. Libérer chacun de ses habitudes primaires, c’est aussi le libérer de cette accélération du temps, de cette pression de ces process technologiques. Et pour finir, je tiens à dire que je suis choqué de la violence de l’institution à l’égard des lycées professionnels, qui n’ont par exemple toujours pas de cours de philosophie. Ils ont une diminution des enseignements généraux, alors que ces enseignements leur permettent de devenir des citoyens dans une démocratie solidaire. » Il conclut cette table ronde sur la nécessité de recréer des établissements à taille humaine, de créer une école commune car « sans école commune, nous assisterons à une explosion des singularités, et finirons par détruire la maison commune. »
Les invités se sont ensuite prêté au jeu des questions-réponses avec la salle.
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