Mon enfant entre en internat : comment maintenir le lien ?
Vous en avez longuement discuté, la décision a été prise et réfléchie. Pourtant, au moment d’aller installer votre enfant dans son nouvel établissement, les questions fusent. Va-t-il se sentir abandonné ? S’habituera-t-il à la vie en communauté ? Dois-je l’appeler souvent au téléphone ? Sera-t-il soumis à de mauvaises influences ?
Le départ d’un enfant en internat entraîne de grands changements au sein d’une famille, ne serait-ce que dans les habitudes de vie au quotidien : une place vide à table, le silence dans
sa chambre, une logistique familiale allégée en déplacements, tâches ménagères, devoirs… Mais ce départ, au-delà de l’absence physique, suscite aussi mille et une questions ou inquiétudes.
Choix ou contrainte ?
Bien souvent, une page se tourne sur l’enfance et la relation parent-enfant s’en trouve bouleversée. Si certains parents vivent assez sereinement ce départ, d’autres peuvent être confrontés à des sentiments de manque, de culpabilité, voire d’échec. Habitant des zones rurales éloignées ou désireux d’accéder à une formation spécialisée n’existant pas dans leur région, nombre de jeunes n’ont, en effet, pas d’alternative que l’internat.
D’autres, en revanche, deviennent internes par choix, soit des parents, soit du jeune lui-même. Face à des difficultés scolaires, certains parents sont tentés d’y voir la possibilité de donner un nouveau cadre et des règles de vie plus strictes à leur enfant. Certains jeunes,
eux, réclament l’internat pour fuir des situations familiales conflictuelles et une ambiance tendue à la maison.
« Suivant les cas, la séparation sera alors plus ou moins compliquée. Si, c’est par exemple pour des raisons géographiques, toute la famille et l’enfant ont anticipé depuis des années ce départ et s’y sont préparés. De même, si le départ est le fruit d’une volonté de l’enfant de se différencier, par choix aussi d’orientation scolaire, et que la décision est prise de façon collégiale avec l’accord de toute la famille, cela se passe généralement tranquillement », constate Monique Vial, psychologue au Centre hospitalier Saint-Jean-de-Dieu de Lyon, qui s’est intéressée à L’internat comme un espace transitionnel pour grandir.
En revanche, sur fond de conflit familial et de crise d’adolescence, le départ en internat peut être vécu plus douloureusement. Il peut se traduire chez l’adolescent par la souffrance notamment de se sentir « mis à l’écart ». Les parents, eux, peuvent être touchés dans leur narcissisme. « Confier l’éducation à un tiers, à un anonyme, c’est forcément compliqué et on peut se sentir en échec, c’est un ressenti naturel car, en tant que parents, on aimerait être tout pour ses enfants ».
Accepter de le laisser grandir
Espace transitionnel, l’internat offre pourtant au jeune l’opportunité de s’éloigner du nid familial pour apprendre à voler de ses propres ailes, faire ses expériences, construire son identité et son individualité. Si les parents l’acceptent, l’enfant suivra », analyse Monique Vial. Pour maintenir des liens à distance, là encore, tout va dépendre des besoins de chacun.
Le mieux est de les exprimer sans détour avant le départ, d’instituer ensemble des rituels rassurants. « Arriver à se dire les choses bien en amont, comment on peut faire ensemble, fixer les fréquences de retour, la possibilité de se téléphoner à jour fixe dans la semaine et d’avoir une représentation des contacts réguliers », conseille Monique Vial, « même si par la suite, ce rythme n’est pas forcément respecté, l’important est de partir avec l’idée que ce lien est possible ».
S’il sera sensible, à son retour, à l’envie des parents de bien l’accueillir, d’organiser ensemble repas familiaux et sorties, il faut aussi se dire que le jeune va vivre en dehors de la maison une autre expérience, qu’il peut se sentir différent et n’aura pas forcément besoin des mêmes choses. « Chacun va devoir se réadapter à cette nouvelle personne en train d’éclore. En ouvrant une porte vers l’extérieur, on a ouvert le champ des possibles… ».